8 OCTOBRE 15H30 I MAISON DE LA CULTURE MAGHRÉBINE IBN KHALDOUN
TEXTE CURATORIAL :
Quoi de plus naturel pour un photographe que de clamer la primauté du regard et l’engagement de l’œil dans le processus créatif qu’il entreprend. Jacques Pérez, grande figure de la photographie tunisienne, en est convaincu. Un jour, lors d’une interview, il déclare : « Je trouve que les photographes ont la jubilation du regard. Ils aiment regarder ». Cette association entre la jubilation et le regard, nous éclaire sur l’approche photographique de l’artiste et nous offre une clé de lecture.
Admirateur insatiable de l’être humain, il lui dédie la quasi-totalité de son œuvre. Il côtoie les serveurs affairés des petits cafés, observe les vendeurs ambulants dans la rue, scrute les fidèles de la Ghriba, examine les pêcheurs qui accomplissent leurs besognes quotidiennes, guette une silhouette derrière un moucharabieh. Ses photos racontent sa Tunisie et son héritage. En couleur ou en monochrome, elles puisent dans la Tunisie traditionnelle qu’il chérissait.
La singularité de son œuvre repose sur un éclectisme qu’il entretient naturellement. Refusant toute hiérarchisation dans le choix de ses sujets, sa détermination est immuable ; un marchand de tapis peut solliciter l’intérêt de l’artiste tout autant qu’un sourire d’enfant ou un étalage de lunettes solaires. La valeur de l’objet photographié importe peu du moment que l’œil s’y attarde et lui accorde son attention. L’artiste joue la carte de la diversité si bien que le spectateur peut rester perplexe lorsqu’il côtoie l’insolite dans ses photographies. Une audace dont seul Jacques Pérez conserve le secret.
Le regard de Jacques Pérez est direct et sincère. Son œil capte, compose, cadre puis active le déclencheur. Cette machine miraculeuse qui cherche, intercepte et transmet devient le prolongement de sa sensibilité et son esprit. Son regard poétique fige un moment précieux. L’artiste fait partie des rares photographes à avoir cette élégance à regarder sans photographier. C’est peut-être ce miracle qui enthousiasme le photographe : l’ivresse du regard.
Pour rendre compte de l’œuvre intégrale de Jacques Pérez, il faudrait saisir cette corrélation entre le photographe et cette jubilation du regard. Le spectateur s’interrogera, et avec raison, sur la pertinence de cette relation en déchiffrant l’articulation visuelle que propose cette exposition.
Amira Zili
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Jaou a tenu à rendre hommage à ce grand photographe tunisien qui a marqué l’histoire de la photographie en Tunisie. Cette série de photos a été sélectionnée à partir de son ultime exposition « Souvenirs d’avant l’oubli… », octobre 2021. Les photos ont été gracieusement confiées à l’équipe de Jaou par l’association « Nous tous », propriétaire des tirages.
SOUS LE COMMISSARIAT DE AMIRA ZILI :
Née le 2 février 1978, à Tunis. Amira Zili est multidisciplinaire. Elle écrit des articles sur la scène artistique tunisienne, participe à plusieurs expositions photographiques notamment à Monastir et au festival international de la photographie de Chefchaouen au Maroc. En 2021, elle est la directrice artistique de ‘Utopies Visuelles 4’ (UV4), un évènement artistique annuel organisé par la galerie d’art contemporain, ElBirou. Elle détient un mastère en littérature anglaise et elle est spécialiste dans l’édition numérique scientifique.
